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6 | Courtoisie
Le récit de Julien
J’entame l’entretien des harnais d’attelage en vue des présentations d’automne quand il m’appelle. Autrement dit, je n’ai pas vraiment l’esprit disponible.
- « Tu es aux Chênaies ? Je peux passer ? »
Bien sûr ! Quelle question, Jérôme !
C’est fou comme démonter, nettoyer puis remonter toutes ces courroies me demande de la concentration. Je me bats avec une boucle de l’avaloir dont l’ardillon est grippé quand Jérôme s’encadre dans l’ouverture, tout sourire.
En short, tee-shirt, tennis, sa tignasse bouclée et sa barbe en désordre, les jambes et les bras nimbés de sa fourrure claire, il bascule souplement d’un pied sur l’autre, fait naturellement rouler ses épaules, balançant les bras comme s’il se préparait à entrer sur le terrain lors une phase de jeu déterminante ... Un beau mec.
Je le devine accompagné.
Il efface son épaule droite en lançant son bras vers l’arrière et ramène devant lui un jeune homme à qui je n’accorde qu’un coup d’œil rapide : en début de vingtaine, châtain aux cheveux courts, la barbe juvénile clairsemée, de belles épaules mais un peu rond.
Il est un peu plus petit que Jérôme et il a, soudain, clairement rosi, clignant rapidement à plusieurs reprises des paupières. À la mine amusée qu’affiche Jérôme, je devine que celui-ci lui pelote le cul au passage.
- « Je te présente Joris »
- « Bonjour ... »
- « Bonjour Joris. Moi c’est Julien, puisque ce rustre ne nous a pas présenté. »
Jérôme se fend d’un grand sourire, son bras vient entourer les épaules du garçon, son poignet cassé laissant sa main pendre nonchalamment sur le torse. Ses doigts pianotent et viennent titiller le téton qui pointe sous le polo.
Bon, ça va, j’ai compris.
J’ai retenu un soupir exaspéré et j’ai baissé les yeux pour reposer la sangle à la boucle récalcitrante, exactement à sa place afin de ne pas compromettre la facilité de remontage ultérieur du harnais. Je me sens légèrement agacé par cette irruption impromptue alors que j’ai dû me mobiliser pour cette tache fastidieuse et accaparante, quasi une corvée, que je viens à peine d’entamer.
- « J’ai proposé à Joris de venir faire ta connaissance sachant qu’il a de ces qualités que nous apprécions au plus haut point, crois-moi. »
Je relève précipitamment les yeux sur eux. Jérôme pince et étire ostensiblement le téton de Joris et je surprends le regard enjôleur que ce dernier posait sur moi. Il bat alors précipitamment des cils pour le filtrer. Et j’avoue que la maladresse de sa tentative de dissimulation un peu affectée achève de m’excéder.
- « Et de quelles aptitudes parlez-vous donc ? »
J’ai parlé à voix basse, sourde tout en rabaissant le regard sur mon travail en cours, soucieux de préserver avant tout ce qui a déjà été accompli. Dans un geste machinal, ma main droite remonte la manche de ma cotte sur mon bras gauche tandis que je l’étends pour replacer une autre sangle sur son plat. Un ours mal léché.
- « Je suis désolé, Julien ... »
La voix assurée et bien timbrée du jeune homme suffit à casser net la manifestation de mon humeur maussade et me fait le regarder enfin plus attentivement.
Dans l’univers dissimulé des rencontres sexuelles entre gay, seul le silence règne habituellement, la communication n’est faite que de signes, de mimiques, de postures, de gestes plus ou moins autoritaires, de soupirs, comme si le verbe pouvait nous démasquer.
Or, non seulement Joris parle mais il affiche une franche assurance, un peu appuyée même et je jurerais qu’il prend sur lui. Cependant ses yeux sont plantés droit dans les miens et il s’efforce de ne pas ciller.
- « C’est Jérôme qui m’a parlé de toi et c’est moi qui ai insisté pour te rencontrer. »
Il a avancé le bras au jugé et sa main vient délicatement effleurer le mien, passant en rase motte sur mes poils pour les faire vibrer sans les écraser. Je ne peux réprimer un réflexe de frisson. Sans se départir de son calme, il ajoute avec le plus grand sérieux, un ton plus grave :
- « Je n’aime que les hommes poilus. »
Et il soutient effrontément mon regard. Pas si fragile, le garçon. Mon intérêt s’en trouve piqué. Jérôme s’est rapproché de lui dans son dos et, passant la main sous son polo en remontant depuis la taille, il vient impitoyablement cueillir le téton du jeune homme dont les yeux tentent de résister. Mais un hoquet étranglé fait subitement sursauter sa pomme d’Adam, il fronce ses sourcils, implorant, puis s’effondre, laissant échapper un soupir.
Mais que manigance Jérôme derrière le sourire machiavélique qu’il m’adresse ?
Décidément, je crois qu’il me faut renoncer à l’entretien de mes harnais. Pour l’heure, je n’ai plus vraiment la tête à ça, mes hormones me jouent un tour ! Cependant après que, par leur irruption, ils aient bousculé mes projets, en retour, j’ai envie de les déstabiliser quelque peu à ma façon. J’adopte alors un ton des plus sombres.
- « Laissons cela, si vous voulez bien, ne restons pas là. »
D’un pas martial, je les entraîne dans les écuries, désertes en ce moment. Dans les rayons de lumière qui percent la pénombre dansent des myriades de poussières en suspension dans la chaleur sèche. Les lieux regorgent de paille et de fourrage, empilés en prévision de l’hiver prochain et quelques bottes qui n’ont pas trouvé place empiètent sur le passage. Rassemblées à la hâte et recouvertes d’une couverture militaire grise, elles composent rapidement une estrade dont Jérôme qui m’a prêté main forte a immédiatement saisi le profit à tirer.
Il a plongé ses mains dans les poches de son short et laisse négligemment tomber ce qu’il en a retiré, de petits rectangles à l’enveloppe métallisée. Joris leur accorde un rapide coup d’œil puis s’approche résolument de Jérôme qui se balance d’un pied sur l’autre face à moi. Il a glissé ses deux mains autour de sa taille entre short et tee-shirt et se caresse souplement le ventre, mandibule décrochée et désaxée, roulant des épaules , ce qui lui donne cet air de contentement de celui qui s’apprête à passer à table et semble assuré de voir le moindre de ses désirs assurément comblé.
Est-ce donc cela ? Veut-il me faire spectateur du triomphe de sa virilité velue que j’avais remise en cause ?
Joris a directement posé ses deux mains dans la broussaille et retroussé le tee-shirt vers le haut pour y enfouir sa face sitôt la toison découverte. Bras levés, Jérôme achève de s’extraire du vêtement et, basculant d’un pied sur l’autre, bassin en avant, s’offre à l’adoration du jeune homme qui y noie son visage et ses mains aux doigts en étoile.
Jérôme rayonne. Il envoie ses deux bras par en-dessus le dos ployé, dans les reins de Joris, empoigne son polo qu’il dégage de la ceinture, le remonte. Joris se tortille en tous sens pour s’en libérer tout en s’efforçant de rester en contact étroit avec cette fourrure qui, visiblement, le transporte et qu’il bécote maintenant avec ardeur. Les grandes mains de Jérôme parcourent le large dos nu à la belle peau claire et tendue ainsi dévoilée puis il empoigne la ceinture qui entoure une taille peu marquée, il lui imprime deux ou trois tractions sèches.
Aussitôt, de ses deux mains, tout en veillant à garder le nez dans la toison, Joris s’active à se débraguetter puis à faire glisser sur ses hanches son pantalon que Jérôme chasse vers le bas d’un sec revers de la main, révélant à mes yeux ravis un panorama des plus à mon goût.
Car Joris a un cul magnifique, charnu, blanc laiteux, encadré par les lanières d’un jock bleu.
Pas un cul de femme, épanoui en poire, non !
Un bon gros cul d’homme, rond, plantureux et … pour moi, terriblement tentant.
Je le regarde, je le jauge ... je l’admire, serait plus exact.
Une bonne taille quarante-quatre, de quoi remplir les deux mains d’un honnête homme.
Je relève les yeux dans ceux de Jérôme et je le vois hilare. Ses grosses pognes se sont fermement refermées sur le jouvenceau pour le maintenir en place et me permettre de reluquer cette merveilleuse pleine lune tout à loisir. Joris est plié en deux, embrassant et léchant le nombril du poilu tout en pointant vers moi son somptueux pétard de callipyge.
Sans me quitter des yeux, Jérôme décrit lentement des cercles sur ces deux hémisphères avec ses deux mains comme pour les polir et en faire reluire l’orient, étirant délicatement d’un sens ou de l’autre les globes qui s’écartent ou se resserrent, me laissant entrevoir la vallée et la promesse de ses délices. Puis il lui administre une petite tape sèche.
- « Achève de quitter tout ça, maintenant. »
Précipitamment, Joris s’agenouille, délace ses chaussures, retire ses chaussettes, dégage l’une après l’autre chacune de ses chevilles, se perchant sur un pied puis l’autre, sans que je perde une miette de ses contorsions qui tour à tour, le cambrent, le déhanchent, soulèvent un côté puis l’autre dans une démonstration éclairant la souple mécanique capable d’animer cette croupe majestueuse étroitement sanglée par le jock.
Jérôme lui ayant intimé de lui retirer ses propres tennis, ce parfait cul de violoncelle s’est accroupi en appui sur ses talons et son sillon s’aplatit ou se referme, selon que son buste se penche en avant ou se redresse au gré des nécessités de ce service rendu.
Je dois être en apnée depuis un moment déjà et Jérôme ne se tient pas d’un rire silencieux en jetant de rapides œillades à ma mine de chien d’arrêt tétanisé.
Joris a soulevé le pied droit de Jérôme posé en offrande sur ses deux mains en plateau et le caresse, l’embrasse puis, à petits coups de langue dardées, le lèche consciencieusement.
Tsss ! Secoué d’un brusque frisson irrépressible, Jérôme le lui soustrait vivement et le repose à terre, offrant à hauteur du visage de l’orant le paysage de ses deux cuisses velues. L’autre y incruste aussitôt son visage, ses doigts en peigne râtelant le chaume depuis les mollets. Dodelinant de la tête, Joris se hisse lentement à l’aide du vérin de ses cuisses jusqu’à ce que son front vienne soulever le paquet du poilu pendant que ses mains volubiles montent et redescendent le long des jambes solidement plantées.
D’une main sur le crâne, Jérôme accompagne d’abord les petites rotations du cou de celui qui tente de se nicher puis, lentement, il le repousse et le garde à distance. De son autre main, il dénoue le lacet tressé qui retenait son short, glisse son pouce sous l’élastique et interpelle son pénitent d’un coup de menton volontaire.
Ayant probablement reçu l’assentiment du postulant, d’un mouvement rapide, il avance puis abaisse son bras, ne me laissant qu’un très court instant entrevoir sa bite bandée qui jaillit car, comme la truite qui mouche bondit hors de l’eau pour gober l’imprudent insecte qui voletait près de la surface, la bouche vorace de Joris engloutit immédiatement le membre appétissant qu’il entreprend derechef de pomper avec la dernière énergie.
Jérôme en flageole un instant sur ses jambes avant de se reprendre jusqu’à imprimer son rythme à celui qui ne demande visiblement qu’à améliorer ses prestations pour le plus grand plaisir du petit taureau qui a maintenant les yeux révulsés, la bouche ouverte.
Sa mine extatique a dû me faire glousser à mon tour car il me considère soudain, l’ironie teintant sa prunelle. De la main, il ralentit le mouvement de pendule du grassouillet.
- « Tu perds la notion de la plus élémentaire courtoisie et tu oublies de remercier notre hôte, il me semble. »
Amical72
amical072@gmail.com
Callipyge, adjectif. Vient du grec kallipugos qui signifie « belles fesses » de καλός / kalόs « bon, beau » et πυγή / pugế « fesse ». Qualificatif des statues de la déesse Aphrodite, figurée en train de soulever son péplos (vêtement grec) pour admirer ses fesses par-dessus son épaule. Par allusion à ces statues antiques de Vénus, Callipyge ; en parlant d’une personne : qui a de belles fesses, harmonieusement arrondies. Voir La Vénus callipyge du Louvre
Stéatopyge, adjectif. Du grec stéato- « graisseux », « graisse », et -pyge « à fesses, à derrière ». « Qui est caractérisé par un développement exagéré du tissu adipeux des fesses ; qui a de très grosses fesses. Les uns ont pensé que les populations aurignaciennes dont les habitants de la Grotte Chauvet se rattachaient à la race boschimane, seul type humain dans lequel on observe à l'heure actuelle ces caractères stéatopyges (Hist. sc., 1957, p. 1490). Employé comme substantif féminin. Femme aux fesses énormes. Voir les sinistres études des charmes particuliers de la fameuse Stéatopyge ou Vénus hottentote (G. DE WALLY, Nouvelle Revue ds FRANCE 1907).
* Pedro chante :" L'amour, ce fruit défendu, vous est donc inconnu Ah! Cela se peut-il, joli petit bourgeon d'avril ?" / et Honorine lui répond : " Non je ne l'ai jamais vu, jamais vu ni connu ..." Dans le registre franchement cocasse, extrait de la comédie Musicale "Toi c'est Moi" de Moïsès Simons, voici l'historique invitation qu'en 1936, André Berley adresse à Pauline Carton- Sous les Palétuviers
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