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12 | Joli cadeau
Le récit de Julien
Après nos galipettes, nous avons pris une douche rapide en chahutant comme deux ados attardés, la facilité de cette entente me remplissant d'une légèreté toute confraternelle.
- "Allez, viens avec moi nourrir mes juments!"
A ma grande surprise, il accepte avec un enthousiasme malicieux et m'emboite le pas. Arrivé au pré, il tend la main vers moi, s'empare d'un seau et marche à ma hauteur à la rencontre des quatre juments flanquées de leurs trois poulains qui s'approchent droit sur nous à grand pas.
Pourtant; il semble ne manifester aucune appréhension.
Il a visé la bête la plus à l'extérieur, il a fait un pas de côté et a vivement posé son seau au sol. La jument y a promptement plongé le nez et il a le culot de venir lui caresser l'épaule ... avec le bras tendu, certes, mais en m'adressant tout de même un sourire de triomphe.
Sur le chemin du retour, il me dit:
- "Je vais être obligé de rentrer maintenant!"
Je hoche la tête, l'air grave.
- "Bien sûr, il faut rentrer faire ta lessive, reprendre ton brushing et cuisiner ton casse-croûte pour ton déjeuner ..."
Il hausse une épaule et détourne la tête vers l'extérieur.
- "Tu as vu combien il te faut de temps pour rentrer, tu sais que je me lève tôt ... "
Nous sommes arrivés et je vais ranger les seaux empilés, il marche sur mes talons, l'air buté.
-"Tu parles de tes obligations mais tu n'en as qu'une seule : être à l'heure pour ta prise de poste. Tout le reste est un choix qui t'appartient, celui de partir dés maintenant pour t'infliger une soirée en solitaire ou d'attendre demain matin et partir pour être à l'heure. "
D'un de ces faisceaux bleus qui sont accrochés un peu partout dans toutes les écuries, j'ai tiré une fine ficelle de lieuse et je me tourne vers lui.
- "Tends ton bras, s'il te plaît."
Je passe la ficelle sous son poignet et remonte les deux brins pour les croiser au-dessus, redescendre puis, après plusieurs tours, je l'enroule autour d'un montant voisin et je termine par une boucle simple dont j'équilibre les deux ailes avec un grand soin, volontairement affecté. Je contemple mon travail puis je regarde fixement Mehdi quelques secondes.
- "Tu as maintenant compris ce que j'en pense mais c'est toi qui choisis, Mehdi."
Je tourne les talons et je rentre à la maison. Je prends une revue et m'asseois dans le canapé. Je sais que, peut-être, il va revenir pour enfiler sa combinaison, bafouiller un prétexte et partir. J'y suis prêt, je serai attristé mais pas abattu. Je retrouverai alors le calme serein de ma solitude, j'irai jeter un dernier oeil alentour et choisirai un programme télé devant lequel je grignoterai ...
Il entre, referme la porte soigneusement, s'approche, se laisse tomber lourdement à mon côté et je le regarde du coin de l'oeil dans l'attente du verdict.
- "Tu as raison, ce week-end avec toi est ... super sympa, alors je vais aller jusqu'au bout. Demain sera un autre jour et je rejoindrai directement mon boulot. Qu'est-ce qu'on mange?"
Il a tourné la tête vers moi et me regarde franchement d'un oeil limpide.
- "Putain, déjà qu'on est pédés, Mehdi! C'est pas toujours facile mais on fait face, on réussit l'exploit d'être nous-mêmes en bravant les interdits et les jugements ... alors c'est pas pour nous mortifier au nom d'autres conventions tout aussi arbitraires. Moi, je passe un bon week-end en ta compagnie et je n'avais pas envie qu'on se prive de cette soirée parce la bienséance te dit qu'il serait plus convenable de rentrer. Ma porte reste toujours ouverte pour les gens de bonne composition."
Il sourit, énigmatique, puis il déplace latéralement sa mandibule, baisse à demi sa paupière dans une grimace d'embrumé mimant une laborieuse tentative de réflexion.
- "Oui, mais en plus, avec moi, tu baises !"
Et il rit! Mais quel plaisant coquin que ce garçon!
Il se lève d'une détente, se place face à moi et me tend cérémonieusement la main droite. Je la saisis et, d'une vigoureuse traction, il me redresse. Nous nous retrouvons debout face à face, affrontés, à nous toucher. Il n'a pas laché ma main et ses yeux vont et viennent latéralement sous ses sourcils froncés, ils m'examinent de leur noirceur la plus dense comme pour traquer, au-delà de mon visage, mes pensées les plus secrètes, débusquer la moindre de mes intentions. Je ricane pour me dégager mais il poursuit en secouant la tête.
- "Je reste aussi parce que je me sens rempli d'une étonnante vitalité, d'une force sourde en moi. Non seulement je n'ai honte ni de ce qu'on a fait ni de ce que je suis mais j'en suis presque fier ou, du moins, je me sens capable d'affronter quiconque chercherait à m'en faire reproche. T'es contagieux, Julien!"
Je l'avoue : cet instant, ce regard, ce discours me douchent.
Désagréablement.
C'est un filet d'eau glacée qui coule dans mon cou. J'étais tout au plaisir de sa compagnie à la fois amicale et lubrique, je nageais dans la superficialité, l'insouciance de l'été et l'inconséquence du plaisir, j'étouffais toute tentation de misanthropie dans un bain de chaleur humaine et voilà qu'il ramène soudain une lourde gravité qui m'effraie, une conséquence que je soupçonne d'être prête à me happer, me contraindre et, immédiatement, j'ai envie de protester, de battre en retraite, ... Je DOIS lui dire que ... dissiper toute confusion, stopper tout emballement ...
- "Tu sais, Mehdi ..."
Et puis mes yeux retrouvent les siens et je les vois si confiants, si calmes, si dénués de calcul, si chaleureux qu'instantanément, je reprends pied, j'efface ma méprise.
Non, il ne se pend pas à mon cou comme un désespéré à celui d'un sauveteur ; non, il n'entre pas en pâmoison comme une groupie, il ne s'aveugle pas stupidement d'une idolâtrie absolue pour un simple week-end de vacance. Il se tient face à moi et il sourit, malicieux. Simplement, uniquement malicieux.
Alors je me réjouis.
Car si j'ai pu lui offrir une échappée belle vers une plage de calme et de plaisir partagés, une vraie pause pour souffler, être attentif à soi et aux autres, alors nous nous sommes bien entendus.
J'entoure ses épaules de mon bras et l'entraîne pour fouiller dans mes CD et retrouver ce vieil enregistrement de la blonde France Gall.
"Il jouait du piano debout / C'est peut-être un détail pour vous / Mais pour moi, ça veut dire beaucoup / Ça veut dire qu'il était libre / Heureux d'être là malgré tout / Il jouait du piano debout / Il chantait sur des rythmes fous / Et pour moi ça veut dire beaucoup / Ça veut dire "essaie de vivre / Essaie d'être heureux, ça vaut le coup"
Nous avons prospecté de concert dans le réfrigérateur, les placards et avons opté pour la facilité d'une abondante salade mixte que nous avons partagée avec appétit. Puis nous avons rangé, fait la vaisselle naturellement, comme si l'habitude avait déjà pris place.
- "Veux-tu que nous regardions la suite de Lawrence d'Arabie"?
Il a ri, s'est approché, a posé son bras à cheval sur mon épaule et ouvert de grands yeux.
- "Tu m'as invité à un week-end pour cinéphiles, c'est ça?"
Et, dans une souple détente de sa nuque, il m'embrasse. Ses lèvres douces se posent délicatement sur les miennes, veillant à ne pas les écraser, et la lame vibrionnante de sa langue se glisse entre les miennes. Comme un coquillage s'ouvre aux courants nourriciers, j'écarte progressivement les machoires et, au fur et à mesure, sa tête accentue son inclinaison quand sa langue se déploie dans ma bouche comme un large ruban satiné dont le flot entoure la mienne, la soulève, l'enveloppe, la fait tournoyer dans une sarabande qui alterne danses endiablées et souples valses voluptueuses et, parfois, se mue en sautillements de l'insaisissable fée clochette, entremêlant nos salives et nos odeurs que je capte à narines déployées.
Nos corps, que nos mains, nos bras enserrent et rapprochent à les inscruster l'un dans l'autre, se frottent et cherchent sans cesse l'encastrement le plus étroit qui nous fusionne.
Sur une dernière succion de sangsue, il décolle ses lèvres en retenant ma tête à deux mains. Ses yeux sombres farfouillent furieusement dans les miens puis il relève lentement le menton pour que son regard plonge dans le mien depuis une position d'ascendant. Il sourit.
- "Et si, pour ce supplément offert, ce papa poilu s'en remettait à mes bons soins, hmmm?"
Sa main s'est infiltrée entre nos bassins et moule scrupuleusement mon gourdin pour une planche anatomique précise et détaillée tandis que, basculant la tête d'un côté à l'autre, il m'administre de fugaces baisers sonores en altenance avec de promptes lècheries baveuses. Il se hausse sur ses orteils et cherche à me faire reculer sous cette pression.
Mais je reste solidement campé, je ne suis pas un de ces actifs si faible qu'il rend facilement les armes sans combattre, alors je résiste, me hausse à mon tour, fanfaronne, le regard durci.
Mais je jubile intérieurement.
Je ne déteste pas être l'objet du désir de cette jolie paire de pommes fermes et affamées que je pétris à pleines mains, qui roulent et roucoulent déjà dans mes paumes, se montrant tour à tour serrées et impénétrables avant de s'alanguir et de fondre comme de petites brioches moelleuses, trompeuses séductrices dont le sucre et le miel dissimulent, à grand mal, l'appétit carnassier.
- "On va dire que je suis le mousse de quart et que tu m'as confié le gouvernail."
Et sa main s'est emparée de la barre qu'elle palpe, sur toute sa longueur, pour se l'approprier, assurer sa prise franche de l'outil, quand la candeur qu'affichent ses yeux se voudrait rassurante berceuse d'endormissement. Ruse ou chatterie?
Mais si certains assurent que des rangées de dents aiguisées défendent l'entrée de ces antres secrets et mystérieux vers lesquels nos reins nous envoient irréprésiblement, un piège qu'ils redoutent si fort qu'ils ne savent plus que le prendre d'assaut, en soudards, pour tenter de le désamorcer, il y a beau temps que je n'ai plus peur de ces fantasmagories ridicules, que j'ai accroché à ma ceinture tout un trousseau de sésame secrets pour en obtenir l'accès.
Moi, c'est bien volontiers que je m'offre pour un sacrifice consenti, car je sais que n'est pas une morsure castratrice que me promet son sourire alors que d'un doigt, il a étiré l'élastique ceinturant mon short. Son autre main y plonge et ramène au jour mon cierge brandi que ses doigts parcourent religieusement. D'un geste preste, il enveloppe mes couilles de sa main en coupe puis revient agacer ma hampe de mille touches légères qui m'émoustillent.
D'un trépignement, j'ai libéré mes chevilles du vêtement et, obéissant à la pression désormais farouche de son regard, commencé imperceptiblement à reculer vers la chambre.
De son autre main en étoile, il explore la toison de mon ventre que recouvre mon tee-shirt, soulevant le tissu que je finis par arracher à deux mains et envoyer voler par dessus ma tête pour m'offrir à ses caresses. Mais, tandis que ses doigts se régalent de ces territoires dévoilés, il désarme d'une esquive chacune de mes tentatives de le toucher en retour, secouant la tête en dénégation, s'appliquant à me rester inaccessible, souriant de me cantonner à être son jouet.
Il m'a conduit au pied du lit et, sous sa pichenette, je m'effondre en arrière sur le matelas. M'aidant de mes coudes et de mes talons, je recule jusqu'à ce que ma nuque et mes épaules trouvent l'appui de la tête de lit. Il me contemple patiemment, savourant sa victoire sur son prisonnier priapique puis, posément, quitte son tee-shirt, abaisse son short et se coule sur le lit, tel un chat qui fixe sa proie du regard.
Ses yeux! Tout passe par ce canal et la tension entre nous me cloue au mur. Sa main sur mon cou-de-pied a envoyé une décharge électrique qui remonte jusqu'à la racine de mes cheveux, érigeant chacun de mes poils sous sa vague réfrigérante. Mais ses lèvres posées sur mon mollet, la pointe humide de sa langue comme une aiguille d'acupuncture qui trace un filet léger sur l'intérieur de ma cuisse me vide de toute volonté d'opposition, de tout réflexe de fuite, me réduit à l'état de chamallow gémissant. Un gouffre s'ouvre à la place de mon nombril et m'avale, basculant mon bassin, hissant mon mat dressé. Derrière lequel, comme une nouvelle lune, se lève son front, ses yeux, son visage. De l'apex, sa langue trace un fil humide vertical sur mon scrotum et s'écrase pour entreprendre l'ascension de ma tige. Le frein l'arrête.
Il hausse lentement ses épaules, enroule sa nuque, relève les yeux sous ses sourcils pour ne pas quitter les miens ... et ses lèvres viennent napper mon gland.
C'est onctueux, lent, épais comme un caramel liquide. Une merveilleuse sucrerie.
Mes yeux se ferment et j'en gémis.
Il me recouvre d'un fourreau soyeux et délicat qu'il déploie vers le bas, retrousse, ajuste, déroule à nouveau ; il me presse, m'aspire, me ventouse. Tout mon corps se tétanise, tendu vers lui derrière ma bite en étrave et je donnerais tout pour qu'il ne s'arrête jamais.
Mais sa main me saisit ainsi qu'un manche d'outil sur lequel sa langue court et virevolte, plonge et remonte, s'attarde et dégringole, s'enfouit dans mes broussailles, s'agite, farfouille, s'écrase brièvement, chaude et puissante sur mon anus, s'envole et s'enroule autour de mon gland, lascive, trempée, insaisissable.
Magistrale.
J'en ai le souffle court, suspendu à sa prochaine initiative à la fois espérée et redoutée. Sidérante.
Rupture. Irruption de l'efficacité. Il tend le bras, le ramène, déchire l'étui, me capote avec dextérité et la fraîcheur du gel me fait sursauter mais son massage énergique dissipe aussitôt le frisson. Il m'enjambe et sa main dans son dos s'empare de ma queue, la guide, la maintient.
A nouveau, le temps ralentit. Il me coiffe, me recouvre, m'enveloppe, glisse, coulisse, m'absorbe, m'engloutit. Je suis Jonas dans le ventre de la baleine mais un Jonas bienheureux qui, les mains posées sur ses cuisses, détaille son visage de martyr agonisant. Mehdi, maintenant profondément empalé, menton relevé et narines palpitantes, recouvre progressivement ses esprits, rabaisse ses yeux dans les miens. Son sourire s'élargit et il me toise, me défie, m'interroge.
Oh oui, je les sens bien, ces ondes que ton fourreau frémissant fait courir le long de ma queue solidement plantée en toi et, sous mes mains, je perçois les lentes contractions de tes cuisses en ressort, qui te haussent, te redescendent, te ralentissent, tes discrets basculements de bassin grace à quoi tu te caresses sur mon dard brûlant, tous ces jeux de tension infimes suivies de relâchement qui nous électrisent, nous soudent ou nous décollent, bloquent nos souffles ou nous précipitent dans une chute sans fin, un vertige qui nous suffoque ... et nous ravit.
Car les sourires que nous échangeons disent assez les vagues de plaisir qui nous submergent et aussi la fierté de voir l'autre y succomber à son tour, yeux révulsés, bouche happant un air devenu trop rare et de savoir en être la cause avant de s'abandonner soi-même à la griserie de ses caresses.
Et je devine les effets émolients de ces assauts de sensualité sur ton arrogance de dominant, je la vois s'effriter, s'amoindrir, chanceler. Je te guette, te surveille ; je regarde progresser cette quête de plus en plus pressante de la satisfaction, de la jouissance, de l'étourdissement.
Et le moment est venu pour moi de te renverser sur le côté, d'enchevétrer une de tes cuisses avec les miennes, de relever l'autre, le genou à ton épaule, de m'imposer dans l'intervale ainsi ouvert, de m'assurer que ma queue charnue te comble et de t'inviter fermement.
- "Viens maintenant, Mehdi! Branle-toi, asperge-nous de ton foutre, beau mec!"
Et je le cingle. La course est courte et brève mais l'élan puissant, le déclenchement sec ; le choc franc comprime sa fesse et le rythme s'applique à rester lent, mesuré, comparé à la frénésie de son poignet, à son halétement, aux frissons qui le parcourent et le secouent impitoyablement.
Je me régale déjà, anticipant ma facile victoire qui le verra se répandre tandis que je le ferai reluire encore, au-delà de la jouissance, à supplier de mettre fin à de si douces tortures qu'elles lui seront insupportables de volupté ...
Mais dés son premier cri, dés son premier panache que je n'ai pas même vu retomber, je n'ai pas su résister. Mes doigts se sont crispés à marquer sa peau, mes mains refermées sur ses hanches, mon bassin a bondi vers l'avant, le profond, le moite, au-delà du défendu ... J'ai fermé les yeux, ébloui à mon tour, ajouté mon grognement au sien et me suis écroulé sur lui.
Enchevêtrement de membres, de poils, de liqueurs. J'ai retiré mon préservatif pour ajouter les miennes en onction, en friction ; lui, je lui ai léché le museau comme un roudoudou collant, baveux, posé et repris, partagé sans regret.
Et il s'est défendu mollement, en postillonnant en guise de protestation mais il a ri, de ce rire enfantin, clair et joyeux qu'on aime entendre après un bon moment partagé, signe d'un bonheur stratosphérique, inaccessible car hors d'atteinte de tout soupçon, inaltérable, qu'aucun mauvais sort ne saurait flétrir ou ternir, inoxydable, qui rend tangible la force de vie que chacun de nous a en lui!
Et voilà le joli cadeau qu'il m'offre pour parfaire ce week-end de vacance.
Amical72
amical072@gmail.com
* En 1980, France Gall enregistre une chanson de Michel Berger Il jouait du piano debout
Fin de la saison 11 / J’accueille vos encouragements, remarques, questions, suggestions ... avec intérêt ; toutes seront les bienvenues et je m’efforcerai de répondre à chacun d’entre vous aussi rapidement que possible.
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