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5 | La traque
Ce que je n’ai pas dit c’est qu’un des motifs de rupture avec Matthias était que j’avais appris que pour ma seconde année universitaire j’allais avoir la chance de partir étudier à l’étranger. C’était un rêve pour moi et je voulais voyager l’esprit léger. Profiter de ces quelques mois à l’autre bout du monde pour me confronter seul à beaucoup de nouvelles choses.
J’ai donc passé quelque mois célibataire avant le grand départ. J’ai profité de cette période pour approfondir un peu ma connaissance de ma propre sexualité. J’ai à peu près essayé toutes les catégories de porno à l’époque. Je voulais voir ce qui nourrissait mon imagination et me créer de nouveaux fantasmes. Après tout je venais de réaliser un de mes fantasmes les plus anciens. Alors je me suis beaucoup branlé. Parfois même jusqu’à en avoir mal. C’était plusieurs fois par jour, je n’avais plus de limites et j’avais juste envie d’assouvir cette envie de jouir permanente. Alors je suis rentré avant mon départ dans cette routine : préparation du départ, études, branlette. En boucle.
Quand l’heure du départ est arrivée, le choc a été un peu rude. Je partais pour le Canada, seul pour terminer mon diplôme. Et j’avais toujours cette furieuse envie de me branler. De rencontrer des mecs pour m’amuser un peu. Ce que je ne savais pas à l’époque c’est que je m’apprêtais à m’installer dans un pays super froid. Ou il est compliqué de rencontrer du monde.
Je me suis installé et fait des amis rapidement. J’avais une chambre sur le campus où j’étudiais.
Au Canada, les écoles sont des bâtiments très imposants. En général ils sont en plusieurs bâtiments. Un pour les cours, un pour le sport et un pour les logements s’il y en a. La particularité de mon campus. C’est qu’il était d’un seul tenant. Un immense rectangle. Les salles de cours au rez-de-chaussée. Les chambres, cuisines et salles de bains réparties dans les étages. Et enfin une aile du bâtiment pour les loisirs. Une salle de sport, une salle de concert, une salle de billard, dans salons pour regarder des films entre étudiants. C’était très américain comme ambiance.
J’avais eu la chance d’avoir une chambre seul. Beaucoup d’étudiants avaient un colocataire. Ça favorise le rapprochement en général dans ce genre d’ambiance… Mais je suis le type de mec à aimer être tranquille une fois de temps en temps. Et vu ma nouvelle passion pour le sexe, j’étais ravi d’avoir un espace juste à moi pour me branler régulièrement.
Je commence mes cours. C’est intéressant. Les quelques potes que je me suis faits sont vraiment cools. J’apprends plein de choses sur leur pays, leurs habitudes. Ils me traitent comme un petit français qui doit un peu tout ré apprendre. Et c’est vrai. S’adapter à une température négative (-40 degrés) c’est pas forcément simple. J’ai donc adapté mon mode de vie pour vivre en intérieur. Je comprenais d’un coup mieux l’intérêt de ne pas avoir à changer de bâtiment pour les cours et pour la vie de tous les jours.
Un jour que je suis avec mes amis, en train de regarder un film dans un des salons. Une des filles du groupe arrive avec une affiche dans la main et nous regarde amusée.
« J’adore ce moment de l’année ! Vous savez pourquoi ?! Parce qu’on reprend la saison des bals »
« Des quoi ?! » je demande un peu choqué et amusé. Je prenais conscience que j’allais devoir me plier aux coutumes nord américaines du bal…
« Oui, cette fois ils nous ont pas gâtés sur le thème… Ça va être une tannée pour s’habiller. »
« C’est quoi le thème ? » je demande, inquiet.
« Ce n’est pas compliqué, mais en général les étudiants étrangers ont jamais ce qu’il faut dans leur valise… Du coup si je te dis “ bal en blanc ”, t’en as du blanc toi ? »
« Devine quoi … J’ai absolument rien de blanc. »
Et deux semaines, et une séance de shopping après on se retrouve la fameuse semaine du bal. Pour expliquer contrairement aux États-Unis, on va au bal seul. Pas de pression sur le fait d’y venir accompagné. C’est juste une soirée ou tout le monde danse, boit et s’amuse.
La veille de la dite soirée, j’allume Tinder. J’ai envie de me branler, mais pas seul. Je préfèrerais un truc un peu plus humain. Je swipe quelquefois. J’ai l’impression que tous les profils sont super loin de moi. Dans mon coin paumé et dans mon campus, j’ai du mal à croire qu’absolument personne de gay soit sur Tinder…
Je swipe.
Je swipe.
Et là je tombe sur un profil qui m’intéresse un peu. Le mec s’appelle Paul. Il a une tête qui m’est sympathique. Il a pas énormément de photos. Il a un visage assez fin, il a une barbe de trois jours, assez travaillée. Il a un grand front, et des cheveux châtains. Mais surtout ce qui me fait craquer sur son profil à cet instant précis c’est ses oreilles. Elles sont très légèrement décollées. Et je suis du genre à aimer les petits défauts. Il a mon âge. Il est pas loin. Je swipe à droite. J’aimerais bien en savoir plus sur lui.
Et là, on match direct. Ça veut dire qu’il à déjà vu mon profil. Qu’il voulait aussi me rencontrer et que donc on peut parler dès maintenant. Alors j’envoie le premier message. Quelque chose de bateau pour commencer. Déjà voir s’il n’écrit pas avec les pieds. Il répond.
Il écrit convenablement. Il pose quelques questions en retour et montre un peu d’interêt.
La discussion tourne rapidement sur le fait que comme moi il s’est rendu compte que personne n’est dans notre secteur. Et pour rire on se dit qu’on aura pas le choix que de faire avec ce qu’on à sous la main.
Seulement un détail me revient. Il n’est vraiment pas loin. Sa position m’indique qu’il est environ à 100 mètre de ma position. Clairement, il est dans l’école. Mon cerveau fonctionne à plein régime. Il est dans l’école. Il est minuit et quelque. Donc il habite ici. Donc il a forcément ses cours dans cette école.
Est-ce que je l’ai déjà croisé ? Je ne sais pas.
Est-ce qu’il m’a déjà croisé ? Je lui demande.
Est-ce qu’il est dans les même cours que moi ? Je suis sur que non, je l’aurais déjà remarqué.
Et j’en viens à la question fatidique. « Du coup tu fais quoi demain soir ? T’as prévu d’aller au bal en blanc ? » Parce qu’il me plait bien. J’ai envie de le rencontrer. Apparement lui aussi vu la vitesse avec laquelle il me répond.
« J’avais rien de prévu demain soir, mais je peux me faire un plaisir de t’y retrouver si tu veux »
OK. Donc ce mec rentre dans mon jeu. Et demain pendant un truc qui m’aurait habituellement un peu barbé, je vais devoir retrouver un mec à qui je n’ai parlé que sur une application. Dans une grande salle remplie de jeunes alcoolisés. Entre une scène avec de la musique trop forte, et un bar ou le cocktail à base de vodka est à seulement 2 $…
On se met d’accord. Si c’est moi qui le trouve, c’est moi qui lui paye un verre et inversement.
Le soir même après nos cours, le bâtiment complet se transforme. Toutes les portes des chambres sont ouvertes, les gens se préparent. La musique du grand hall monte jusque dans les chambres et fait monter la tension. Je rigole avec mes amis et leur explique ce qui doit se passer ce soir. Que je dois rencontrer un mec et lui offrir un verre, mais que je risque d’avoir du mal à le reconnaître.
Tout le monde joue mon jeu. Tout le monde veut le trouver. Parce que je suis du genre à vouloir payer le premier verre. Toujours.
Donc on descend en bas. Dans le hall. La lumière est complètement baissée. Ce sont les spots de la scène qui éclairent toute la salle. Les spots sont bleus. On est tous habillés en blanc. Il est donc très difficile de distinguer qui que ce soit même dans ses propres amis.
Et je commence ma traque. Je vais chercher un verre. Il n’est pas au bar.
Je croise quelques amies avec qui je m’arrête danser. Je regarde autour de moi. Je veux le trouver. Je sais qu’il est là. Il m’a clairement dit qu’il viendrait.
Je cherche. Partout. Et il n’est pas là.
Je commence à perdre espoir et trouver ce jeu un peu moins drôle tout d’un coup. Parce qu’il n’est joué que par moi.
Et alors que je m’apprête à dire à une amie qu’il n’est pas là et que j’arrête. Je me tourne vers les escaliers. Et il est là. En hauteur. Dans l’escalier. Il descend avec une bande d’amis à lui. Uniquement des mecs. Il est un peu plus petit que dans mon imagination mais ça me plait encore plus. Les mecs petits c’est mon genre.
Mon jeu reprend. Je profites du fait qu’il doive à son tour s’habituer à l’éclairage. Il ne me verra pas en descendant. Je me retourne. Pour être sur. Puis je me déplace dans la foule. Pour le surveiller. Les gens dansent. Lui a du mal à se mettre dans le rythme. Il est au bar. Et je vois qu’il cherche quelque chose du regard. C’est moi qu’il cherche.
Dans ma tête je suis là « ce que tu ne sais pas c’est que moi je sais parfaitement où tu es et que je vais attendre que tu sois seul pour t’aborder. » J’ai l’avantage. Je sais où il est. Mes amis ont vu que j’avais repéré le garçon en question. Ils me laissent jouer mon petit jeu. En m’observant de loin.
Son groupe d’ami rejoint la piste de danse au compte goute. Il prend son verre en dernier. Et donc, va rejoindre la piste de danse en dernier. Comprenant qu’il va être seul quelques secondes je me glisse jusqu’au bar. Juste à sa gauche. Et quand la barmaid lui demande 2 $, je tends un billet en souriant.
« C’est pour moi »
Il se retourne à peine. Lève le menton du fait de notre différence de taille. Il me regarde. Et malgré l’éclairage je le sens qui rougit.
Je lui laisse le temps de s’adapter. Il prend son verre et en boit une très grand gorgée. Je commande un verre en même temps.
Il se colle un peu à moi et me dit. « Tous mes amis vont m’attendre. J’ai très envie de te parler et de te rencontrer mais là tout de suite, ils vont se demande ce que je fais. Et ils savent pas qui je suis vraiment… Donc on peut trouver un moment pour nous deux un peu plus tard ? »
Je le regarde droit dans les yeux et j’ajoute « Je t’ai déjà attendu une heure donc je t’en laisse deux de plus. Dans deux heures en haut de l’escalier du hall. A tout à l’heure. »
Il me demande « Mais je leur dis quoi ?! »
« Tu vas trouver. Si t’en as vraiment envie tu vas trouver. »
« Ok a dans deux heures alors. »
« Attends avant d’aller danser. C’est impoli de ne pas trinquer pour ton premier verre de la soirée. »
On trinque et il me regarde en rigolant. Il s’éloigne tranquillement et j’entends sa bande de potes « Bon bah alors qu’est-ce que t’as foutu ?! Avoue toi aussi t’as été choqué du prix… »
J’avais donc deux heures pour faire monter la tension. Il savait qui j’étais et inversement. J’allais profiter de ma soirée avec mes amis. Avec un œil sur ma montre. Et c’est ce que j’ai fait. Pendant que je danse, je le vois. Nos regards se croisent. On danse clairement l’un pour l’autre.
Il me regarde autant que je le regarde. On a envie de se parler et de se découvrir. Mais pour l’instant on peut juste se voir de loin. L’alcool monte progressivement. J’enchaine les verres. Juste assez pour être joyeux, pas bourré. Et je le vois qui boit aussi. Il s’arrange pour suivre mon rythme. On se retrouve au bar et on continue de se payer des verres mutuellement. En terminant toujours par un petit décompte du temps qu’il reste avant notre rendez-vous en haut de l’escalier.
Au bout des deux heures, je m’arrête de danser. Je me décide à monter tranquillement. Je vais attendre en premier en haut de l’escalier. De là-haut je pourrais voir quelle excuse il trouve auprès de ses potes pour sortir et remonter. Sauf qu’il monte dans l’escalier en même temps que moi. On arrive en haut de l’escalier en même temps. Il me pousse contre la rambarde.
« Tu es sur ?! Non parce que tes amis peuvent nous voir d’en bas… »
« Ils sont tous complètement bourrés. Et attends de voir s’ils s’inquiètent de ma disparition… »
On regarde tous les deux vers le hall. À aucun moment ils se sont inquiétés de le voir partir. Personne ne nous a suivis du regard. On est donc tranquilles.
Il me demande « Tu es un colloc toi ? Parce que sincèrement si tu n’en as pas on peut aller discuter chez toi ? »
« Je n’ai pas de colloc. Par contre si tu veux j’ai d’autres bières là-haut. »
Alors on monte. Et dans l’escalier menant aux chambres, on discute un peu.
« Alors comme ça tu n’es pas tout à fait au clair avec ta sexualité ? »
« Comment ça ? » il me demande.
« Personne n’est au courant pour toi c’est ça ? »
« À vrai dire moi non plus. Je n’ai jamais rencontré de garçon avant toi. »
Je le regarde un peu amusé.
« Tu donnes bien le change pour quelqu’un qui n’a jamais rencontré de mec… »
On arrive devant la porte de ma chambre. J’ouvre. Je l’invite à entrer. Il passe devant moi. Puis je referme la porte derrière nous.
Ce qui s’est passé dans cette chambre ce soir-là vous sera raconté au prochain chapitre. J’ai conscience d’avoir été un peu moins « sexuel » sur celui-ci. Mais il fallait un peu détailler la rencontre avec ce fameux Paul. Ça reste un bon souvenir. Assez drôle. Le contexte rajoutera autant de piment au prochain chapitre croyez moi !
Merci d’avoir pris le temps de me lire ! N’hésitez pas à m’écrire à l’adresse mail je réponds à tous les coups. J’aime avoir votre avis et savoir ce que vous avez pensé du chapitre !
Zack
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